Reine de nos pelouses, la Pâquerette vivace nous honore de sa floraison quasi permanente quand les autres plantes sont au repos. Bien plus qu’une touche de couleur dans nos jardins, parcs, prairies, elle n’est pas sans qualités.
Origine du nom de la Pâquerette
La Pâquerette dont le nom latin Bellis perennis pourrait se traduire par beauté éternelle est une plante vivace de la famille des Astéracées aussi appelées Composées.
Selon les régions, on la nomme, entre autres, petite marguerite, pâquerette des près, fleur de Pâques, fleur de tous les mois. Son nom anglais Daisy proviendrait de l’anglo-saxon daeges eage (days’eye, « œil du jour ») en référence à la fleur qui s’ouvre le matin et se ferme le soir.
Il existe de nombreuses théories quant à l’origine de son nom scientifique. Le plus fréquent et, aussi, le plus probable serait qu’il dériverait du latin « bellus » se traduisant par joli, élégant et évoquerait sa beauté. Une théorie plus populaire l’associerait à « bellum » signifiant « guerre » du fait que la Pâquerette pousse très souvent sur les champs de batailles ou de sa capacité à soigner les blessures profondes issues de combats. Dans la mythologie romaine, Ovide nous a témoigné qu’elle tirerait son nom Bellis d’une Dryade nommée Belides qui, pour échapper à Vertumne, dieu des jardins et des vergers, se métamorphosa en Pâquerette. Chez les Celtes, elle serait également associée au dieu Belenos, symbole de la jeunesse, du renouveau, et par extension, du printemps.
L’épithète latin perennis, de « per annos », signifie pérenne, vivant plusieurs années.
Dans la culture populaire, son nom vernaculaire viendrait de Pâques du fait que sa période de floraison la plus importante se situe au début du printemps. Toutefois, François Noël, écrivain et diplomate français, donne dans son Dictionnaire étymologique une autre origine qui sera, plus tard, validée par Émile Littré. D’après ces derniers, étant donné que la Pâquerette fleurit quasiment toute l’année, son nom viendrait de l’ancien français « pasquier » désignant les prairies et pâturages, lieux où elle pousse principalement.
Description
Espèce commune et très rustique, la Pâquerette fleurit toute l’année avec un pic de croissance s’étendant de mars à novembre.
Ses feuilles se développent en rosette sur un rhizome rampant. Ovales et velues en départ de végétation, elles deviennent spatulées avec une nervure centrale bien apparente et un bord légèrement crénelé.
La floraison de la Pâquerette
Ce que nous considérons ordinairement comme la fleur de la Pâquerette n’est pas, du point de vue botanique, une fleur unique mais un capitule portant de nombreuses fleurs comme toutes les composées. La partie que nous voyons comme pétales est, en fait, un ensemble de fleurs ligulées, c’est à dire en forme de languette. Ce sont des fleurs femelles ou parfois stériles de couleur allant du blanc au rose purpurin. Le centre jaune regroupe un nombre important de fleurs tubuleuses mâles ou hermaphrodites. En plus de la fonction reproductrice qui leur est propre à chacune, chaque forme de fleur a un rôle distinct pour la pollinisation. Les fleurs ligulées attirent par
les pollinisateurs qui féconderont la plante.
Après la floraison, l’ est constituée de nombreux petits . Ceux du pourtour arborent de fins poils et ceux du centre sont glabres.
La nuit, la « fleur » de la Pâquerette se ferme. Ce phénomène, appelé , est favorable à la croissance de la plante ainsi qu’à la protection des organes reproducteurs contre les intempéries. Cela permettrait, aussi, d’être un moyen de défense contre les herbivores actifs de nuit tels les limaces et les chevreuils. La Pâquerette a aussi la faculté de se fermer quand le temps tourne à la pluie, ce qui permettait dans les campagnes de prévoir l’arrivée imminente d’averses.
La Pâquerette peut être confondue avec la Pâquerette des bois (Bellis sylvestris) à floraison automnale ou avec la Pâquerette annuelle (Bellis annua) poussant toutes deux en région méditerranéenne, avec l’Aster fausse-Pâquerette (Bellidiastrum michelii) que l’on retrouve dans les bois montagneux ainsi qu’avec la Pâquerette des murailles (Erigeron karvinskianus).
Où rencontrer dame Pâquerette ?
La Pâquerette, très commune en Europe est présente jusqu’à 2500 m d’altitude sur des sols légèrement humides, toujours compacts et à la végétation très rase tels les bords de chemin, les pelouses urbaines ainsi que les gazons particuliers. Sa rosette plaquée au sol et la régénération rapide de sa tige florifère lui permettent de résister aux tontes régulières et, dans les prairies au piétinement du bétail.
Souvent, on retrouve la Pâquerette en association avec le Grand plantain (Plantago major), le Ray-gras anglais (Lolium perenne) et autres espèces résistantes au piétinement.
Bio-indicatrice, la Pâquerette est caractéristique d’un sol en cours de décalcification due à un lessivage et/ou une érosion importante entraînant une perte de la fixation des argiles et des matières organiques.
La Pâquerette plante comestible
Crues, les jeunes feuilles de la Pâquerette ont un léger goût de noisette avec une note de poivre. Toutefois, celles plus avancées ont un retour en bouche un peu âcre et il est donc conseillé de les consommer en mélange dans des salades composées.
On peut aussi s’en servir pour élaborer des boissons lactofermentées ou finement hachées dans de la crème fraîche pour élaborer une sauce pour le riz, le poisson, etc.
Les capitules de fleurs en boutons peuvent également être consommés. Ils peuvent être utilisés crus ou cuits pour les salades, les soupes ou bien se conserver au vinaigre comme les câpres.
En Italie, elles servent à la préparation de soupes, de farce pour la fougasse ou de sauces en accompagnement de viandes.
La Pâquerette plante médicinale
Les capitules contiennent, entre autres particules des acides organiques, une résine, une huile essentielle, une huile grasse, des sucres non fermentescibles, un principe amer, du mucilage. La plante renferme de l’inuline et dans tous ses organes une saponine. L’herbe et la fleur contiennent aussi de l’acide ascorbique.
Utilisée surtout en homéopathie et peu en phytothérapie, la Pâquerette était surtout en vogue entre le XVème et le XIXème siècle où elle avait une excellente réputation comme plante dépurative.
En usage interne, on s’en sert pour lutter contre les affections respiratoires, les règles douloureuses et les maux de tête. En usage externe, elle combat les affections rhumatismales, diverses dermatoses tel l’eczéma, les ecchymoses et les contusions. Elle accélère aussi la guérison des plaies, des furoncles et des ulcères.
Comme la Marguerite (Leucanthemum vulgare), les capitules de fleurs et les feuilles de la Pâquerette peuvent être macérées dans du vin blanc. Ce vin de Pâquerette peut être bu à jeun comme diurétique ou en lotion contre les coups, les blessures légères.
En Autriche, les capitules floraux sont couramment utilisés comme un thé médicinal aux vertus gastro-intestinales et respiratoires.
Des recherches récentes ont démontré que la Pâquerette vivace a des effets antimicrobiens et lutte contre le cholestérol.
Toutefois, il est déconseillé d’utiliser la plante durant la grossesse et l’allaitement, avant l’âge de 7 ans et en cas d’allergie au pollen d’astéracées.
Les pâquerettes ornementales n’ont pas les propriétés des pâquerettes sauvages.
Cédric Daguet
Photographies : Cédric Daguet